De nombreux candidats se posent la question. Pour réussir son entrée sur le marché du travail, faut-il miser sur les diplômes ou plutôt sur l’expérience professionnelle ? Petit tour d’horizon pour savoir quel atout CV, en 2018, séduit davantage les recruteurs.
L’état actuel du marché français se caractérise par son ambiguïté. Selon un sondage réalisé en 2015 pour la plateforme Monster, « le manque d’expérience est le principal frein à l’embauche selon les jeunes diplômés », rapporte en effet Clémence Boyer (source Les Echos) . Toutefois, les évolutions sociétales des trente dernières années ont érigé la scolarisation et les diplômes en « passages obligés » vers l’emploi, comme le rappelle Catherine Agulhon dans son article « Diplômes-expériences : complémentarité ou concurrence ».
Match nul, donc ? Pas si sûr. Dans le domaine des ressources humaines en particulier, de nombreux facteurs inédits pèsent dans la balance.
Le type d’entreprise
Grands groupes, PME ou startups ? La nature et la taille d’une structure sont déterminantes dans les critères de recrutement. Ainsi, les grands groupes et les PME vont hésiter à embaucher un jeune sans expérience et lui préférer les « profils confirmés ou ayant fait leurs preuves », tandis que les startups se montrent moins frileuses et embauchent « principalement des jeunes diplômés », affirme Melissa Carles sur netpme.fr. Un pari payant puisque, selon le même article, les startups rencontrent moins de difficultés à embaucher que les PME (43% contre 60%).
Indispensable donc pour beaucoup, le diplôme est néanmoins une valeur déclinante, comme le confirme Ingrid Falquy sur Cadremploi.fr : « Alors que les recruteurs français ont la réputation d’embaucher sur diplôme, ils y attachent aujourd’hui de moins en moins d’importance. (…) Pour les recruteurs, les études supérieures ne préparent pas assez à la vie active. [Ils] déclarent aussi avoir de plus en plus besoin de personnes ayant un niveau d’expertise élevé, qui s’acquiert davantage sur le terrain que sur les bancs de la fac. »
Le marché international
Si les employeurs français présentent des exigences mitigées, quid des recruteurs internationaux ?
Tout dépend bien sûr du pays visé. Certains prisent les candidats français en raison de la bonne réputation du système d’enseignement. Les entreprises internationales recherchent les profils français pour leurs compétences, a fortiori s’ils ont fait un stage à l’étranger.
Toutefois, l’expérience est un critère d’embauche de plus en plus prépondérant pour les recruteurs autour du globe. Ainsi, constate Mircea Vultur de l’INRS Urbanisation Culture Société, « Au Québec et au Canada, comme dans l’ensemble des pays de l’OCDE, […] l’expérience professionnelle apparaît comme le critère le plus valorisé dans le processus d’embauche. Indicateur du potentiel d’adaptation, l’expérience est un signal stratégique de la compétence qui devance le diplôme. [Et ce] tant pour les techniciens que pour les professionnels et les cadres par la plupart des recruteurs interviewés. »
Les « nouveaux métiers »
Avec le développement des nouvelles technologies notamment, de nombreuses compétences en vogue ne font l’objet pour l’instant d’aucun diplôme reconnu. Plus qu’un cursus, c’est donc la capacité à démontrer certaines compétences qui sera un atout crucial à l’embauche dans les années à venir, estiment Pierre Manière et Sylvain Rolland dans La Tribune.
« La numérisation, le développement continu des nouvelles technologies, les évolutions démographiques et les préoccupations écologiques transforment les métiers actuels. Ces mutations sociétales contribuent à l’apparition de nouvelles compétences portées par la génération Y et à la formation en devenir de métiers inédits que pratiqueront dans la prochaine décennie les purs digital natives. »
Grâce à cette véritable « révolution des métiers », des compétences à la fois techniques et comportementales (de la maîtrise de l’intelligence artificielle aux nouvelles panoplies de soft skills) pourraient donc prendre le pas sur les critères d’embauche classiques. Bientôt obsolète, le duo diplômes/expériences ?
La notion d’ « expérience » en question
Même si les experts s’accordent à dire que les diplômes ne suffisent plus, ils ne conseillent pas pour autant de s’en passer. Mieux vaut plutôt reconsidérer la notion d’expérience. Celle-ci n’a en effet pas besoin d’être strictement professionnelle : toute expérience congruente avec le poste visé peut être utilisée pour se démarquer.
« Quand on est jeune diplômé et que l’on veut être chef de projet, on n’a pas nécessairement d’expérience en management. Dans ce cas il faut pouvoir s’appuyer sur des activités extra-professionnelles et les mettre en avant » explique Hervé Weytens, responsable RH au sein du groupe Sogeti-Cagemini, dans une interview pour le BDM.
« Le sport ou la gestion d’un BDE par exemple peuvent être des expériences intéressantes à détailler pour transposer ses aptitudes managériales en entreprise. De cette façon, on peut apporter une vraie plus-value et une différence à son parcours ainsi qu’à son CV. »
Bilan du match ?
Un partout.
Catherine Agulhon prédit d’ailleurs un avenir où domineront les parcours hybrides (avec l’alternance, par exemple). « Les formations sont vouées à être plus professionnalisantes, d’après les recruteurs interrogés. Pour les étudiants de demain : moins de bouquins, plus de terrain ! »
Cet article est paru initialement sur le blog expectra, le blog qui décrypte les problématiques RH.